La découverte de la radioactivité*

LA DECOUVERTE DE LA RADIOACTIVITE

 

1- Les observations de BECQUEREL(1896) :

Becquerel sait que pour qu'un corps devienne luminescent, il doit être exposé préalablement à la lumière. Mais il ne faut pas que cette lumière impressionne directement la plaque photo qui doit détecter le rayonnement émis par le corps. Il enveloppe, par conséquent, des plaques photo dans du carton noir et des feuilles d'aluminium, recouvre l'ensemble de lamelles cristallines de sels d'uranium, et expose le tout au soleil sur le bord de sa fenêtre.
Le 24 février 1896, Henri Becquerel communique à l'Académie que les plaques photographiques fortement protégée de la lumière du soleil ont été impressionnées par un rayonnement invisible pénétrant. Tout semble confirmer son hypothèse de travail: l'uranium émet les « rayons X » pendant sa fluorescence, ces mêmes rayons mis en évidence par le physicien Röntgen peu de temps auparavant ! Certes, les taches observées (voir figure ci-dessous) sur les plaques photo sont bien ténues, beaucoup moins spectaculaires que les images de Röntgen. Mais elles sont bel et bien présentes. Si l'on interpose divers objets métalliques entre le sel d'uranium et la plaque, on voit leur silhouette se dessiner sur les clichés. Les rayons invisibles sont plus ou moins atténués par les matériaux comme les fameux rayons X.
 
 
 
Mais, une semaine plus tard, Becquerel en sait bien davantage. Il veut, en effet, répéter son expérience le 26 et le 27 février. Hélas! Paris est recouvert de nuages. Becquerel abandonne ses échantillons dans un tiroir, remettant son expérience à plus tard. Avant de reprendre ses travaux, le dimanche 1er mars, il développe "par acquit de conscience" ses plaques photo, dont tout laisse à penser qu'elles seront vierges puisque, à l'abri du soleil, la fluorescence des sels d'uranium qui les recouvrent n'a pas pu être excitée. Il découvre qu'elles sont, au contraire, fortement impressionnées et se rend compte immédiatement qu'il est face à un phénomène nouveau qu’il est actuellement incapable de comprendre.
 
Comme il l'établira rapidement, l'impression de ses plaques est totalement indépendante de l'intensité de la fluorescence de l'uranium, donc de l'excitation lumineuse extérieure. Le sel d'uranium émet des rayons pénétrants qu'il ait ou non été exposé à la lumière solaire. L’uranium rayonne spontanément de l’énergie sans aucune intervention extérieure ! Voilà une observation qui vaut la peine d’être expliquée !

 

 

 

2-Un couple de légende : Pierre et Marie Curie.

 

Marie Curie cherchait un sujet de thèse de doctorat. Elle et son mari décidèrent donc de continuer l'étude des nouveaux rayonnements que Becquerel avait découverts en 1895 et qui constituaient un sujet particulièrement intéressant.
Avant tout, elle devait trouver un local pour ses recherches. C'est Pierre Curie qui obtint, pour sa femme, un atelier attenant à l’Ecole de Physique de Paris où elle pourrait travailler.(voir la photographie ci-dessous)
Le local de l’Ecole de Physique et de Chimie de Paris où travaillaient le couple Curie
(Un lieu qui ressemblait plutôt à un « cellier de pommes de terre » dira la presse de l’époque ! )
Pour étudier le nouveau rayonnement, il fallait recourir à une méthode quantitative. Elle décida donc d'utiliser une chambre d'ionisation reliée à l'électromètre à quadrants et au quartz piézoélectrique développée auparavant par les frères Curie, dont Pierre. De cette façon, elle ne devait pas s'acheter de nouveaux appareils coûteux, car durant ses premières années de recherche, Marie n'a bénéficié d'aucune subvention, d'aucune bourse, ni même de salaire. Elle devait s'arranger du mieux qu'elle le pouvait.
La jeune physicienne commença son travail en décembre 1897 et quatre mois plus tard, elle présenta, aux Comptes rendus de l'Académie des Sciences, sa première note, qui était tout à fait remarquable. Elle confirma que l'émission de rayonnement était une propriété intrinsèque à l'uranium provenant probablement de ce qu’on appelait alors les atomes (le modèle de l’atome était encore très grossier à cette époque : l’existence du noyau a été découvert plus tard par Rutherford grâce à la radioactivité) .
Elle découvrit aussi que certains minéraux d'urane étaient beaucoup plus actifs que l'uranium, alors elle en conclut que ces minéraux pouvaient contenir un élément encore plus actif. Les résultats étaient tellement intéressants que Pierre Curie se joignit à Marie pour aboutir à l'extraction de substances radioactives nouvelles et ils poursuivirent leur étude.
Pierre et Marie au travail dans leur atelier
Marie Curie donna le nom de radioactivité à la propriété d'émettre des rayonnements analogues à ceux de l'uranium. Trois mois plus tard, en juillet 1898, les deux chercheurs purent annoncer, dans leur première note commune, la découverte d'une nouvelle substance radioactive : un métal voisin du "bismuth", par ses propriétés analytiques, qu'ils proposèrent d'appeler polonium, du nom du pays d'origine de Marie. Cependant, les résidus de la séparation du polonium étaient encore, eux-mêmes, radioactifs. Ils utilisèrent aussi un autre minerai : la "pechblende" qui contenait une substance radioactive nouvelle, ayant des propriétés chimiques très voisines de celle du baryum. Ils annoncèrent la découverte de cette nouvelle substance en décembre de la même année et lui donnèrent le nom de radium. Le polonium et le radium étaient beaucoup plus actifs que l'uranium et le thorium. Ils parlent de préparations 60 000 ou 50 000 fois plus actives que l'uranium.
Les résultats étaient spectaculaires et attirèrent immédiatement l'attention de la communauté scientifique internationale. Le nom de RADIUM devint le symbole de la matière radiante. Certains scientifiques doutaient de l'existence matérielle des nouveaux éléments, d'autant plus que la nature même de la radioactivité était encore mystérieuse. Ils devaient donc prouver aux incrédules qu'il s'agissait bien d'éléments chimiques nouveaux, en séparer des quantités que l'on pouvait peser et en mesurer le poids atomique. Marie et Pierre Curie choisirent le radium pour continuer leur recherche. Ils décidèrent de réutiliser la pechblende, car ce résidu était, pour eux, très intéressant, premièrement, parce qu'il était bon marché et d'autre part, la séparation chimique avait déjà été effectuée. Marie et Pierre Curie obtinrent du gouvernement autrichien, propriétaire d'une mine de pechblende, l'envoi, à titre gracieux, des cent premiers kilogrammes d'un résidu de pechblende.
Ce fut le début d'un travail considérable. Le seul problème était de dénicher un local pour exécuter les traitements chimiques. Ils trouvèrent finalement un hangar abandonné et se remirent au travail. Ils travaillèrent dans ce laboratoire pendant deux ans, presque sans aide, en s'occupant aussi bien du travail chimique que de l'étude du rayonnement des produits de plus en plus actifs. Au terme de ces deux années, ils en vinrent à se partager le travail.
Pierre et Marie Curie à Sceaux, 1895.
©ACJC
Pierre continua sur les propriétés du radium, tandis que Marie poursuivait les traitements chimiques en vue de la préparation de sels de radium purs. Au bout d'un an, ils se sont rendu compte qu'il serait beaucoup plus facile de séparer le radium que le polonium. C'est pourquoi ils ont orienté leurs efforts dans cette direction.
Ce travail exténuant s'étendit sur trois ans, conduisant à un enrichissement sans cesse croissant des sels de radium. En 1902, Marie Curie annonça un poids atomique (on dirait aujourd'hui masse atomique) de 225±1. La valeur aujourd'hui admise pour le radium est de 226,0. D'une tonne de résidu de pechblende, elle avait pu obtenir environ 1dg de chlorure de radium pratiquement pur. Un nouvel élément de la Classification Périodique était découvert !
En 1906, Marie se retrouva seule pour continuer l'oeuvre commencée, car Pierre décéda accidentellement, renversé par une charrette à chevaux. C'est aux propriétés chimiques et physiques du radium et de ses dérivés qu'elle consacra alors une grande partie de son activité, ainsi qu'à l'étude des rayonnements émis par ces corps et à leur utilisation. Elle étudia les filiations radioactives, cherchant tel ou tel maillon manquant d'une des trois familles radioactives naturelles : celle de l'uranium-radium, à laquelle elle avait consacré tant d'efforts. C'est à cette période que la communauté scientifique internationale décida de donner le nom de Curie à l'unité de mesure de la radioactivité correspondant à la quantité d'émanation en équilibre avec un gramme de radium pur, soit 3,7x1010 désintégrations par seconde.
En juin 1903, Marie Curie soutint sa thèse de doctorat d'état. À la fin de cette même année, Marie et Pierre Curie, ainsi qu'Henri Becquerel se virent décerner le Prix Nobel de physique pour leur découverte de la radioactivité naturelle et pour leurs études des phénomènes de rayonnement. En 1911, le jury des Prix Nobel décida de décerner un second prix (c'est un cas unique), celui de chimie cette fois, pour la découverte des éléments radium et polonium, la séparation du radium et l'étude de cet élément remarquable.
En 1914, il y eut la guerre. Pendant ce temps, Marie eut la chance d'expérimenter la radioactivité sur les blessés de guerre au front. Comme Marie n'était pas protégée contre les rayons radioactifs, en juillet 1934, elle mourut, à Sancellemoz, d'une leucémie provoquée par ses nombreux travaux.
 
Modifié le: Monday 9 October 2017, 08:54